Longueur d'onde

Publié le par Mama Mia


L'onde est une herce qui effleure des pupilles que l'on ose à nouveau interroger quand l'ordre domestique apparent est marqué du signe et de l'empreinte de l'irrépressible dilemme. L'onde est la flamme frondeuse qui bouscule les digues faites de coquillages enlisés, anémiés, tournés vers une mer qu'ils ne prendront jamais. L'onde est la musique évocatrice qui pénètre nos souvenirs à la lumière spectrale de l'absence brutale et subie. L'onde est le cantique qui apaise, dans la cécité imposée, les velléités de rigueur fantasmée à l'ombre de ses aspérités. L'onde est la chaîne qui asservit au rythme des privations, au gré des caprices du créateur. L'onde est la longueur qui unit  tout à coup des solitudes dans l'espace bleutée d'une nuit qui se dessine à tâtons dans une improvisation consentie.

Et jamais la constellation ainsi dessinée ne cesse de s'étendre, grignotant toujours plus l'obscurité sans jamais savoir maîtriser la puissance de ces feux. Secoués, chamboulés, essorés sont les marathoniens qui en apesanteur cherchent l'adhérence pour repousser les frontières de l'espace avec l'avidité des pionniers, en essayant vainement de contenir le temps. 

D'Est en Ouest, le créateur construit sa géographie de l'amour et du désir, franchissant les frontières comme des obstacles avec le goût de l'effort erratique mais débarrassé de ce lest qui l'empêchait de vaquer. Du Midi qui irradie et terrasse les dernières forces consolidées en temps de jachère à ce Nord où l'absurdité des situations empêche toute réalisation mais fait accepter la fatalité et apprécier la futilité comme un ultime pied de nez à la destinée. La longueur de l'onde est indéterminée, échappant sans cesse à ses aspirants cherchant déjà une nouvelle fréquence pour borner l'inconstance en épuisant toute possibilité. A la 2ème station, le corps n'est plus qu'un bloc de matière qui construit sa finalité dans le mouvement.

Nous voilà, force quantique aux pieds d'argile, maîtrisant les paroles mais ne sachant chanter. L'air nous échappe, nous étouffons dans cette nuit faussement estivale de ne savoir écrire la mélodie qui doterait l'onde d'un micro pour que du creux d'une main s'échappent des senteurs élégiaques. 

Dans cette nuit paradoxale, le tonnerre a décroché l'étoile. Tombée à terre, ses branches sont fêlées, ses muscles atrophiés par le temps passé dans la gravité. Que l'onde revienne pour ne raccrocher d'elle que ses rêves au firmament du sommeil et l'immerger dans l'incomplétude d'une imagination taillée dans des gemmes qui voyagent entre dureté et séduction et se perdent dans le jeu et l'abandon. L'histoire de la femme rencontrée s'écrit au présent, enracinée dans ses rêves d'évasion. Mais le présent comme la nuit ne se retiennent pas, sans cesse dépassés, relativisés comme des esquisses d'un grand-oeuvre, bouée de sauvetage face aux déferlantes de l'insensé. Et les mémoires sont courtes quand il s'agit de façonner un avenir en forme d'amphore.

Publié dans Courant poétique

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